Le royaume avant l’Église.


Selon les évangiles, Jésus avait promis à ses disciples qu'ils partageraient avec lui le royaume de Dieu. Ce royaume a été vu et désigné comme, tantôt le royaume d'Israël, tantôt comme le royaume des cieux. Juste après sa mort l'attitude des disciples de Jésus, leurs espoirs et leur désespoir, varie aussi d'un récit à l'autre. Pour ce qui se passe après la crucifixion effectivement il y a tout de même un accord dans les évangiles à savoir le désarroi des disciples, leur défaitisme, et le fait que l'annonce de la résurrection est une nouvelle au quelle il ne s'y attendaient pas, et les prend à revers si je puis dire. Cela les fait revenir et retourner à Jérusalem, on le lit dans l'histoire des pèlerins d'Emmaüs qui tourne le dos à Jérusalem, on a là un récit extrêmement fort, une métaphore de ce qui c'est produit là après le mort de Jésus où le constat d'échec est posé sur l'espoir messianique dans la mesure où la mort c'est déroulé sans signe majeur et sans produire de changement politique. Or les disciples avaient espéré jusqu'au dernier moment un retournement prodigieux des événements ou alors d'un rebond. Jésus leur a annoncé l'arrivée du royaume de Dieu, que celui-ci était parmi eux, et Jésus a terminé crucifié par les Romains, avec peut-être l'aval des autorités juives de son temps. Le royaume de Dieu ne s'est pas matérialisé et pour tous ceux qui n'ont pas bénéficié d'une apparition de Jésus, il n'avait aucune raison de penser qu'il s'était passé quelque chose de particulièrement radical et de nouveau, et donc je pense que pour un très grand pourcentage des juifs qui ne croyaient pas en Jésus, Jésus était un prophète qui s'était trompé c'est-à-dire un faux prophète.

Alors que se passe-t-il ?

Naturellement, le problème se pose à la mort de Jésus quelle signification donné à cette mort ? Cela signe-t-il que Dieu déclenche une crise que son royaume va se réaliser tout de suite ? ou est-ce que la réalisation du royaume de Dieu est renvoyée à l'avenir ?

Il est possible en lisant les évangiles et certainement pour ceux qui les ont écrit, de penser que Jésus a eu une espérance à court terme c'est-à-dire qu'il avait espoir que son message et sa proclamation recevraient un accueil favorable, et qu'il espérait peut-être que le peuple adhérerait massivement à cette annonce et qu'à partir de là le royaume viendrait en quelque sorte s'instaurer quasi naturellement. Que Dieu viendrait parfaire le processus, mais d'une manière relativement éminente. Un texte comme celui des douze trônes trouve quand même une explication la plus probable en fonction d'un horizon qui est à l'horizon terrestre à savoir qu'il y aurait une conclusion terrestre à la proclamation de l'éruption du royaume et que celui-ci trouverait son plein achèvement ici-bas. Dans ces conditions Jésus se serait-il mépris ?

Dans l'évangile selon Matthieu les paroles de Jésus se présentent comme cela « en vérité, je vous dis que vous qui m'avez suivi lors de la nouvelle création quand le fils de l'homme sera assis sur le trône de sa gloire eh bien vous vous siègerez aussi sur douze trônes jugeant les douze tribus d'Israël. »

Ce texte est intéressant parce que si on envisage que cette parole puise remonter au Jésus historique alors derrière le verbe qui est employé en grec pour parler du jugement des douze tribus d'Israël se trouve un verbe en araméen qui est la racine qui veut dire non seulement juger, mais aussi réagir et qui peut donc envisager non seulement le jugement, mais aussi une forme de gouvernement ou en tout cas une forme d'exercice de pouvoir sur les douze tributs. À ce moment-là on peut proposer une double lecture et parmi les lectures possibles une promesse valant pour les disciples, en leur indiquant qu'ils seraient donc associés à un gouvernement du peuple d'Israël dans son ensemble.

Du temps de Jésus terrestre d'après notamment Matthieu, au chapitre 19 Pierre qui lui dit « nous avons tout abandonné qu'est ce que nous allons faire ? » Jésus lui dit « vous allez siéger sur les douze trônes pour juger les douze tributs d'Israël » c'est une manière de dire que les douze doivent véritablement renouveler Israël. Au début des Actes on va reconstituer le groupe des douze parce qu'un d'entre eux a manqué à la mission, celui que l'on appelle Judas que l'on désigne en général comme l'un des douze. Si Jésus a rassemblé autour de lui douze disciples et je le crois fondamentalement, s'était déjà pour exprimer quelque chose vis-à-vis d'Israël et la prétention justement de rassembler autour de ces douze l'Israël renouvelé de façon eschatologique. Donc l'on peu penser que Jésus veuille constituer autour de la proclamation du royaume pour rénover Israël des gestes et des actes symboliques. Le fait que les douze renvoie aux douze tribus d'Israël avaient de ce point de vue là un sens symbolique. Mais il ne faut pas voir Jésus comme instituant les douze de manière solennelle convoquant tout le peuple. Je dirais qu'il y avait un fait qui peu à peu s'est constitué c'est-à-dire que Jésus a constaté, et a donné un sens au fait qu'il y a peu de disciples qui ont été proches de lui et que ce groupe de fidèles il l'a interprété comme groupe des douze.

Trois listes de disciples figurent dans les évangiles de Matthieu de Marc et de Luc, mais elles ne concordent jamais exactement ente elles attribuant des places et des noms différents aux douze disciples. Ce groupe à mon avis n'est pas que composé des douze qui est un cercle restreint nous appelons le cercles des intimes, mais Jésus est entouré d'un cercle d'adhérents beaucoup plus large parmi lesquels on peut trouver Joseph d'Arimathie, Zachée, des femmes signalées par l'évangéliste Luc, Marie de Maggdala et tant d'autres. Donc un groupe je dirais rapproché et un cercle plus large d'adhérents. D'abord, on n'est pas obligé de penser que les douze étaient douze. Parce que douze est un chiffre symbolique, et ce que l'on constate c'est que les listes des douze dans le Nouveau Testament comprennent un certain nombre de figures obligatoires et l'on n'imagine pas une liste des douze sans Pierre, sans Jean, sans André sans Matthieu, mais quand on arrive à la fin de la liste, on voit que l'on a des variations assez importantes donc on a l'impression qu'il y a un quatuor de tête que le premier du quatuor de tête était Pierre, ensuite quand l'on va un peu plus loin on voit que les frontières des douze son flexible. Donc on imaginera que Jésus était accompagné d'un certain nombre de compagnons.

On a de petits détails et je parle au sein des douze indépendamment de Paul, par exemple la fameuse question de « qui est le plus grand » (Marc 9, 30-37) c'est une bonne question qui revient deux fois ou encore à un moment donné Pierre et les autres disent à Jésus (Marc 9 v 38) : « Maître, nous avons vu un homme qui chasse des démons en ton nom ; et nous l'en avons empêché, parce qu'il ne nous suit pas. » On voit ainsi des petits détails qui font penser à une mentalité un peu sectaire ou étroite, et qui disent « c'est nous le vrai groupe et pas les autres ».

Le groupe des douze anticipe le royaume à venir un royaume que certains comprennent comme un royaume céleste vers lequel ils monteront à l'appel du ressuscité. Un royaume que d'autres au contraire n'imaginent pas ailleurs que sur Terre et sur la terre d'Israël enfin purifier de la présence romaine.

En acte 1, v 6 et les suivants et donc tout au début des Actes des apôtres, alors que Jésus ressuscité est en compagnie de ses disciples pendant 40 jours continuant d'ailleurs à leur parler selon l'auteur à Théophile de ce qui concerne le royaume de Dieu, voilà les disciples qui l'interrogent, et lui demande « Seigneur, est-ce en ce temps-ci que tu rétabliras le royaume d'Israël ? »

Qu'est-ce qu'ils attendent ?

Ils attendent que Dieu par un envoyé libère Israël du poids des païens. L'occupation romaine a été vraiment un acte humiliant pour ce peuple qui est tout à fait conscient de ce qu'il représente c'est-à-dire il est témoins de la sainteté de Dieu au milieu d'un monde païens or cela il ne peut même plus le réaliser à cause de l'occupation romaine. Les païens sont là en plein territoire d'Israël et jusqu'à la porte du temple. Il ne faut pas oublier qu'au temps de Jésus de nombreux juifs habitaient en terre sainte et qu'il existait des villes composées largement de Grecs, de non-juifs où se rencontrait des temples païens. Donc pour les juifs les plus traditionalistes la situation était inacceptable. La voie est tracée dans le judaïsme palestinien des années 30, les gens baignent dans l'espoir d'une restauration d'Israël donc dans un espoir dont on connaît les multiples variantes, mais qui en gros trouve sa cohérence dans l'attente d'une restauration de la pureté d'Israël et cela est à la fois le terrassement du mal et ses vecteurs qui sont les impies qui foulent la terre sainte. Mais c'est aussi l'attente de la conversion des pécheurs des gens de mauvaise vie à l'intérieur du peuple. C'est l'attente d'une restauration théocratique.C'est ce que les zélotes vont prendre en charge. Pour comprendre l'enseignement de Jésus et surtout comment il a été perçut à ce moment là, il faut donc ce replacer dans ce contexte de la Judée à cette époque. La Judée était administrée par le gouverneur romain qui était quand même assez féroce et donc de plus en plus de mouvements de type zélotes, qui pillaient et rançonnaient et qui était qualifié de brigands parce qu'ils captaient ce qui devait être des impôts soit pour le temple soit pour les Romains. Ces Zélotes étaient fiscalement brigands ou voleurs, et on les appelait sicaires parce qu'ils possédaient un poignard un peut court. Donc des mouvements de rébellion contre tout et tout le monde, mais religieuses pour ces zélotes.

Donc je crois qu'il est effectivement possible que les juifs du premier siècle de notre ère, en entendant parler du royaume de Dieu puisse imaginer que le règne de Dieu est inévitablement l'instauration d'une autre économie sur la terre d'Israël tout cela est une chose. Mais le règne de Dieu c'est une théocratie exprimée en terme politique, et qui n'est plus une construction artificielle en Israël, avec l'occupation romaine. Le fait que les rois les grands prêtres et n'importe qui collaborent avec l'ennemi fait et démontre qu'il y a longtemps qu'Israël n'est plus une théocratie. Donc l'attente est le rétablissement d'une véritable théocratie. Là-dedans pour le juifs pieux, évidemment au sein de cette théocratie ils pourront certainement avoir des responsabilités, des places, faire valoir des programmes d'organisations. Là-dessus et tous ces espoirs les évangiles sont très silencieux, on parle simplement effectivement du règne de Dieu.

J'ai l'impression que toutes les sources que nous avons ne nous permettent pas vraiment de donner une épaisseur politique à l'action de Jésus. Mais c'est vrai qu'il s'agit de sources qui sont toutes postérieures à sa mort. Donc inévitablement, ce sont des sources qui réécrivent l'histoire à la lumière de ce qui s'est passé ensuite, et du point de vue politique cela est apparu comme un échec. Mais la tradition sur Jésus ne permet pas selon moi de faire l'hypothèse que la libération politique et militaire de la Palestine était pour Jésus un problème de première importance. Il ne l'a peut-être jamais cru. Je crois que le texte de ses enseignements sont très clair, mais à quoi s'attendaient les disciples de Jésus ? Qu'ont-ils compris du royaume de Dieu que leur parlait leur maître ? Ils s'attendaient à la restauration du royaume d'Israël sur Terre, comme presque la totalité des juifs qui espéraient la restauration du royaume et qui même sont partis en guerre contre les Romains. Des pièces de monnaie qui remonte à l'an 60 portent des slogans pour la libération d'Israël. C'est ce que l'on trouve à la fin de l'évangile de Luc. Des disciples sont en route pour Emmaüs, Jésus ressuscité vient à leur rencontre et leur demande : De quoi discutez-vous en marchant ? » Alors, ils s'arrêtèrent, tout tristes. L'un des deux, nommé Cléophas, lui répondit : « Tu es bien le seul étranger résidant à Jérusalem qui ignore les événements de ces jours-ci. » Il leur dit : « Quels événements ? » Ils lui répondirent : « Ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth, cet homme qui était un prophète puissant par ses actes et ses paroles devant Dieu et devant tout le peuple : comment les grands prêtres et nos chefs l'ont livré, ils l'ont fait condamner à mort et ils l'ont crucifié. Nous, nous espérions que c'était lui qui allait délivrer Israël. »

Délivrer Israël veut dire se libérer du joug romain. Or Jésus a défendu un idéal et un programme de réformes d'Israël, mais le fait de se situer à l'intérieur d'Israël ne légitime pas n'importe quel discours et notamment visiblement pas un discourt de type nationaliste. Deuxièmement, nous n'avons pas trace dans la prédication que fait Jésus de trace du type de l'annonce d'un royaume, aux traits spécifiques du nationalisme juif.

Jésus sait que l'armée d'occupation commet des exactions et il est même probable que pour Jésus l'occupation romaine n'est pas une bonne chose. Il y a la fameuse histoire de l'armée des esprits démoniaques. Ces démons qui se nomment légion sont chassés et transformés en porcs. Si celle-ci remonte à Jésus historique, les implications politiques de cette histoire me semblent très claires. Jésus pensait que Dieu était d'une certaine manière en train d'intervenir en chassant ces démons qui matérialisaient l'occupation militaire. Mais apparemment pour Jésus cela n'impose pas d'organiser une révolte politique et militaire. Il dit : si c'est par le doigt de Dieu que j'expulse les démons, alors le royaume de Dieu a fait irruption jusqu'à vous et donc il lit l'irruption du royaume de Dieu à des actes qu'il pose, mais des actes sociaux et qui n'ont rien de politique a priori. Mais qui ont plutôt un lien avec la libération des personnes. Je crois que pour Jésus il faut faire une distinction entre deux catégories et c'est fort important, d'une part on pourrait analyser son intervention en termes d'activisme et d'activisme politique, mais un activiste a en général des partisans et l'on peut l'analyser en termes de prophétie, car Jésus se présente comme un prophète et pas n'importe quel prophète, mais un prophète qui exprime justement ce qui pouvait paraître incroyable à savoir que le royaume de Dieu ait fait irruption et un tel prophète a en général des disciples et c'est plutôt ainsi qu'il convient d'interpréter la venue de Jésus.

Le message de Jésus est donc plus spirituel que matériel.

Jésus dit en quelque sorte « faites-le bien autour de vous parmi les plus pauvres et les plus démunis, les pécheurs et les malades, alors le royaume de Dieu s'approchera de vous et vous vivrez alors dans son royaume. »

Introduire le royaume de Dieu en soit et pour soit conduit à vivre le royaume sur Terre en dehors de tout champ politique. Le royaume que l'on vit ainsi est l'image du royaume de Dieu au Ciel. Mais il fallait le comprendre et apparemment il ne fut pas compris même de ses disciples !

Chez Flavius Joseph on trouve des chefs et plusieurs personnages qui ont été poursuivis puis exécutés par les Romains, mais il ne dit pas vraiment pourquoi. Il est dit que c'était des prophètes faisant des signes et des miracles. Mais il ne dit jamais en quoi c'était une menace. L'exemple le plus clair se trouve au chapitre 20 des antiquités juives, où il est mentionné un prophète égyptien cité aussi dans les Actes des apôtres. Celui-ci promettait que sur son ordre les murailles de Jérusalem s'écrouleraient. Le gouverneur a envoyé ses troupes et il y a eu beaucoup de morts et de prisonniers. On se demande pourquoi un gouverneur romain s'inquiéterait de quelqu'un qui prétend disant « pouf » sur le mont des Oliviers que cela ferait tomber les murailles de Jérusalem. Il y a un autre livre écrit par Flavius Joseph quelque temps plus tôt intitulé « la guerre des juifs » il raconte une autre histoire d'un prophète égyptien qui se préparait avec ses partisans à attaquer Jérusalem. Mais le gouverneur romain les a fait arrêter, etc.. Ici, on a le même écrit par le même auteur le premier écrit dans les années 70, et le second dans les années 90. On voit clairement que Flavius Joseph dans les années 90 avait intérêt à ne pas faire apparaître la figure religieuse du judaïsme comme des menaces pour les autorités romaines. Maintenant si l'on prend les évangiles on n'a pas les deux versions on a que celle où selon l'évangile cela ne représente aucune menace. Il s'agit de tendre l'autre joue de rendre le bien pour le mal, et de rendre à César ce qui appartient à César. S'il ne s'agissait que d'attendre un royaume qui ne menace pas le pouvoir romain, il n'y aurait pas de raison pour que Pilate s'alarme et intervienne. Je préfère défendre l'idée que les Romains se trompaient peut-être sur Jésus, mais ne se trompaient pas sur les partisans de Jésus, et que les évangélistes croyaient sincèrement qu'ils apportaient quelque chose de différent et de plus profond, mais pour les Romains deux royaumes ne peuvent pas coexister. Quand un royaume s'établit à l'intérieur des frontières d'un autre royaume, il y a la guerre et Ponce-Pilate le savait.

Pour Jésus, c'était une position qui est difficile à défendre de fait que la présence des Romains fût considérée par son entourage comme un facteur très important qui empêchait l'instauration du royaume de Dieu. Pour la majorité pour instaurer le royaume, il fallait éliminer l'occupation romaine et avec toutes les conséquences que cela comportait. Mais en Jésus, nous avons un aspect assez paradoxal. Pour Jésus, le royaume de Dieu commence déjà à se réaliser indépendamment de l'expulsion des Romains. Indépendamment d'une hypothèse de purification de la terre d'Israël par une action politique et militaire. Dans les évangiles synoptiques, on trouve des éléments en faveur des deux tendance, à certains moments Jésus parle du royaume de Dieu qui est en nous, un royaume de Dieu intime. Ainsi il utilisera la parabole de la graine de sénevé quelque chose de petit nous tien à cœur. À d'autres moments Jésus nous parle en termes d'eschatologie de la fin des temps et de la destruction du temple. Serait-on en présence d'ajouts au texte ou tout au moins celui d'un rédacteur pour qui le royaume de Dieu est plus matériel que spirituel. La question est donc : doit-on voir là le résultat d'un long processus éditorial et attribué, disons à la première tendance du Jésus historique c'est-à-dire au vrai Jésus ? Peut-on l'attribuer un rédacteur tardif ou doit-on penser que Jésus à différents moments a exprimé différentes réactions voire différents sentiments. N'y aurait-il pas une constance de vision ou de pensée chez Jésus ? Dans ce cas y aurait-il incohérence ou du moins une non continuité dans la pensée de Jésus ?

Ce que l'on peut dire d'historiquement avéré c'est que comme Jésus a été accusé et crucifié avec un panneau qui apparemment indiqué qu'il était le roi des juifs, la proclamation par Jésus du royaume de Dieu a été comprise par certains en terme politique.

Rien ne permet de savoir si Jésus a espéré réellement régner sur Israël. Mais rien ne permet non plus d'affirmer qu'Israël n'était pour lui qu'une question secondaire. Premièrement, il faut constater qu'aucune des prophéties qui lui sont attribuées ne s'est réalisée et deuxièmement que malgré cet échec les Actes des apôtres soutiennent que les premières générations continuent d'attendre et d'attendre encore leur accomplissement.

Dans son deuxième récit de l'ascension c'est-à-dire dans les Actes, Jésus répond à ses disciples qui lui demande « Seigneur est-ce maintenant où tu vas rétablir le royaume d'Israël » réponse : « vous n'avez pas à connaître les temps et le moment que le Père a fixé de sa propre autorité, mais vous allez recevoir une puissance celle du Saint-Esprit qui viendra sur vous ». Le début du livre des Actes témoigne de ce même problème, quand Jésus ressuscité apparaît à ses disciples la première et unique question qui lui pose est celle-là quand vas-tu restaurer le royaume d'Israël. Luc présente cette question comme l'interrogation initiale. Après l'essentiel de sa tache sera de changer les priorités. Tout le livre des Actes se consacre à changer les priorités, à réinterpréter les temps nouveaux. Donc il y a d'une part un déni posé sur la maîtrise du temps, de structurer dans le temps la fin de l'histoire, et pouvoir prévoir le temps de la fin et de l'émergence de la fin. Il y a deuxièmement un transfert de l'intention de la fin de l'histoire ou au-dedans de l'histoire si vous voulez. Puisque l'annonce du Saint-Esprit qui viendra sur vous fonde un programme qui est un programme de témoignage. Un témoignage animé par l'esprit, un témoignage livré au ressuscité. Troisième déplacement, de l'espoir de la restauration pour Israël l'on passe à un programme de témoignages à Jérusalem, dans toute la Judée en Samarie, et jusque qu'aux extrémités de la Terre. Donc les disciples qui espèrent peut-être le rétablissement de type politique sont détournés de cela et renvoyés dans un accomplissement dont le terme n'appartient qu'à Dieu seul. Alors qu'eux-mêmes attendaient un accomplissement imminent, voilà qu'ils sont renvoyés à un écart temporel avant que cet accomplissement survienne et la promesse qui est faite est une promesse qui va les engagés en fait à toute une œuvre missionnaire, puisqu'ils vont être appelés à être les témoins de Jésus à Jérusalem, en Judée en Samarie et jusqu'aux extrémités de la Terre.

Alors cette promesse est d'une habilité prodigieuse de la par de l'auteur puisqu'elle est proclamée par le ressuscité et c'est la seule parole qu'il prononce dans tout le livre des Actes et c'est le plan de tout le livre des Actes. Donc on voit bien qu'il y a un travail de rédaction qui est prodigieuse et qui fait énoncer le plan de l'œuvre par le héros de l'histoire lui-même puisque c'est le Christ qui agit même à travers les disciples au cours de la mission, mais en même temps ce programme va avoir une portée toute particulière puisqu'il va détourner les disciples d'une attente imminente pour remplir le temps qui les séparent de l'accomplissement dernier par une œuvre missionnaire.

Je crois que 20 ou 30 ans après la crucifixion il est devenu évident que le royaume d'Israël ne serait pas restauré. Donc pour les disciples du Christ n'ayant pas assimilé le véritable enseignement de Jésus, à savoir que sur Terre le royaume de Dieu est une chose spirituelle et surtout personnelle, ce dernier ne s'établirait pas sur Terre puisqu'il devait inclure le royaume d'Israël. Les disciples de Jésus et même les gentils 20, 30 ou même 40 ans plus tard ne parvenaient pas à se défaire de cette espérance eschatologique. L'espérance de la fin des temps attachée à Israël. Donc dans cette situation d'où cet espoir n'existe plus, je crois que c'est ce que l'auteur des Actes essaie de faire. Dans une situation où l'espérance eschatologique n'existe pas le royaume d'Israël n'existe pas et vous ne le voyer pas venir ! Il existe alors d'autres options. En effet à la fin des temps, il y a diverses options. Le don du Saint-Esprit, le retour de la prophétie et la spiritualisation, tout ceci existent et tient une place éminente dans le scénario eschatologique. Donc l'auteur du livre des Actes opère ce changement de priorité du royaume réel ou historique, à un royaume de nature plus spirituel à la fin des temps ou au Ciel.

Je pense qu'à l'époque des premiers récits chrétiens à l'époque des premières communautés chrétiennes, l'avenir était un avenir de grandes discussions. Il y avait des attentes impatientes, il ya avait des mouvements apocalyptiques, et il y avait aussi une position que j'estime plus pharisienne qui est la délimitation des zones qui dit : il y a cette Terre-ci ce monde ici, dans lequel on doit admettre même l'occupation étrangère, on doit même prier pour le prince étranger qui occupe le pays, et au lieu d'avoir une espérance apocalyptique pour demain on a plutôt une conscience de la réalité céleste supérieure on remplace les catégories du temps partiel de l'espace. Donc le royaume est un royaume céleste.

Je pense que Paul a beaucoup modifié les interprétations de Jésus. Dans les évangiles, écrits bien après la mort de Jésus et surtout après les épitres de Paul ; on a la très nette impression que Jésus était une sorte de professeur de morale qui attendait l'arrivée du royaume de Dieu dans son acception politique et nationale. Quand il a été tué, les gens croyaient encore qu'il instaurerait le royaume de Dieu et les Romains l'avaient exécuté parce qu'ils craignaient qu'il le fasse. Paul dans une large mesure élimine le caractère national de l'évangile mais aussi celui spirituel/terrestre. Il affirme quelque chose que Jésus n'aurait pas pu dire de son vivant, car il n'était pas parvenu de sa résurrection. Paul peut dire cet homme a été ressuscité, mais comme il n'a pas opéré de changement sur le terrain politique, faisons-le agir au plan individuel. Faisons intervenir Jésus ressuscité dans les problèmes de ceux qui doivent assumer leur condition mortelle faisons de sa résurrection un système théologique qui promettra l'immortalité le salut et l'immortalité reviendront à ceux qui s'attachent à Jésus puisque Jésus est devenu immortel. Dans la première épître aux Thessaloniciens un de ces textes les plus anciens, on voit que Paul est profondément convaincu qu'il sera encore vivant au moment où Jésus reviendra en tant que juge pour sauver tous ceux qui l'on crut en sa parole. Mais Paul ne présente pas cela aux Thessaloniciens comme l'instauration d'un royaume dans ce monde. C'est un élément important, car naturellement les attentes sont vives dans le monde juif de l'époque. On espère la transformation du monde présent, un monde dans lequel Dieu aurait imposé son autorité et dans lequel Israël aurait occupé une position centrale, dans lequel le peuple d'Israël aurait dominé le monde. Mais tous n'étaient pas convaincus que l'on pouvait sauver le monde. De nombreux textes apocalyptiques affirment que le monde devra d'abord être détruit puis recréé par Dieu. Car le monde actuel a été ravagé par le péché. Apparemment pour Jésus le royaume de Dieu commence déjà dans ce monde par nos actions et par conséquent il prétend que ce monde peut être transformé en un royaume de Dieu.

Alors la matérialité du royaume la séparation entre politique et religieux ou en social et spirituelle sont des séparations des distinctions modernes, mais au regard de l'historien et de l'exégète au travers ces textes on devine quand même dans le judaïsme une variété de conceptions du royaume. La particularité de la perspective apocalyptique c'est de faire éclater un certain particulariste de l'espérance. Je crois que Jésus a participé à cet éclatement. Je ne vois aucune opposition entre le terrestre et l'eschatologique. Eschatologique ce rapporte à la fin des temps. Quand la Bible parle des choses qui vont arriver à la fin des temps, ce n'est pas souvent clair. Il peut simplement s'agir du futur ; il n'y a pas véritablement de différence étymologique entre l'eschatologie et le terrestre. Il peut éventuellement y en avoir une entre un royaume des cieux et un royaume terrestre. Pour certains, la vision du futur suppose qu'ils descendront sur Terre, car ce qui vient du Ciel est réputé bénéfique. Quand Jésus a parlé du royaume de Dieu, évidemment il ne parlait pas grec, mais araméen. Évidemment pour lui comme pour tout le monde, pour ses disciples, pour sa famille, tous comprenaient qu'il parlait du royaume de Dieu pour son peuple, le peuple d'Israël, le peuple juif. Le royaume de Dieu signifie que Dieu sauvera le peuple juif d'un point de vue politique. Le peuple juif retrouvera son indépendance. Pour la plupart des juifs de la diaspora si non tous, reviendront d'exil et retrouveront la terre d'Israël et à partit de ce moment sur la terre d'Israël, la Judée, le peuple juif vivra une manière exemplaire, dans un royaume modèle. Dans une société modèle, ce serait cela la réalisation et la manifestation du royaume de Dieu sur Terre.

Avec le temps l'écart va se creuser entre les attentes et les espoirs des disciples de Jésus de son royaume et leurs espoirs leurs attentes après sa mort et c'est notamment la croyance en la résurrection qui peu à peu va transformer le prophète galiléen en Seigneur Jésus puis en Christ ressuscité. Après le mort et la restriction de Jésus dans la mesure où ses disciples étaient convaincus qu'il était ressuscité, l'attente des disciples s'est quelque peut transformé. Il paraît assez clair qu'ils en sont venus à attendre son retour devant eux manifesté dans la pleine réalisation du royaume. La résurrection est combien la parousie le second événement : Jésus est ressuscité et donc il va revenir bientôt ! Paul dit dans l'épître aux Thessaloniciens nous le verrons revenir des cieux il y aura une résurrection générale et dans l'épître aux Corinthiens, nous les vivants serons transformés les morts ressusciteront Jésus doit vaincre toutes les forces hostiles avant de remettre le royaume à son Père. C'est ce qui a été certainement le problème de la première génération. Autant que l'on puise le voir l'espérance du retour du Christ a été quelque chose de fort et il faut bien voir que le retour du Christ c'est la fin des temps c'est l'attente eschatologique donc quelque chose qui sera un bouleversement général de l'ordre du monde des hommes, mais aussi du monde céleste, de tout c'est vraiment le bouleversement intégral. Je conçois la première génération du christianisme comme une forme extrême du judaïsme. C'est pour ainsi dire radioactif elle dégage une énergie incroyable en un temps très court, car pour réussir tous mouvements millénaristes doit évoluer rapidement. Dans les épîtres de Paul, parse qu'il ait voyagé partout d'est en ouest, prêchant partout le retour émanant de Jésus dans sa dernière épître à la communauté de Rome, il proclame encore le salut est plus proche que nous ne l'avons jamais été. Voilà un homme qui depuis plus de 20 ans répète que le royaume va arriver et il n'arrive toujours pas et pourtant dit-il, il est plus proche que jamais. Spécialement dans sa lettre écrite en prison Paul commence à envisager la possibilité qu'il ne sera plus vivant quand le Christ reviendra. Mais cela ne déplace pas de manière décisive sa thèse d'un retour imminent. Naturellement, le problème devenait plus présent à mesure que le temps passait et que ce retour ne se réalisait pas. Il venait nécessaire d'interpréter théologiquement le présent c'est-à-dire le temps compris entre la résurrection et l'ascension et le retour glorieux de Jésus comme juge pour instaurer le royaume de Dieu. Durant les premières années, il n'était pas urgent de traiter à fond ce problème, car Paul pensait que cela interviendrait vite. La première grande réflexion à ce sujet et celle de Luc. Luc tente de donner un sens théologique à l'histoire du présent. Luc dans les Actes considère le retour du Christ comme marginal ; pour cela, reste un horizon important, mais ce n'est pas théologiquement décisif à brève échéance. On peut-être tenté de dire en sondant les bases du Nouveau Testament c'est-à-dire les épîtres de Paul et les évangiles, que plus le texte est tardif plus l'urgence devient minime. Paul attend le retour de Jésus de son vivant l'évangile selon Marc au chapitre 13 prétend que la destruction du temple sonnera la dernière heure à l'horloge de Dieu. On saura que la parousie est imminente lorsque l'on arrive à Matthieu et Luc, ils savaient que la destruction du temple ce n'était pas le signe du retour du Christ. Alors ils ont encore réfléchi la tradition enfin avec l'évangile de Jean la théologie se développe dans une tout autre direction. On peut se dire que plus le temps passe, et plus les attentes diminuent. Mais si l'on regarde d'autres textes comme la deuxième épître de Pierre, c'est un texte ancien qui aurait été écrit dans un Grec excellent de la part d'un modeste pêcheur de Galilée. Le texte aborde les problèmes dans la communauté parce que Jésus n'est toujours pas revenu.

Deuxième épître de Pierre (ch3 v3 - 4) : « Sachez tout d'abord que, dans les derniers jours, des moqueurs viendront qui vivront au gré de leurs propres désirs. Ils tourneront votre foi en ridicule en disant » le fait que les gens commencent à se moquer est la preuve qu'on en est arrivé aux derniers jours. 4 « Eh bien, il a promis de venir, mais c'est pour quand ? Nos ancêtres sont morts et depuis que le monde est monde, rien n'a changé ! 5, mais il y a un fait que ces gens oublient délibérément : c'est que Dieu, par sa parole, a créé autrefois le Ciel et la Terre. Il a séparé la Terre des eaux et il l'a rassemblée du milieu des eaux. 6 De la même manière, Dieu a détruit le monde d'alors par les eaux du déluge. 7 Quant à la Terre et aux cieux actuels, ils sont réservés par cette même parole pour être livrés au feu : ils sont gardés en vue du jour du jugement où tous ceux qui n'ont aucun respect pour Dieu périront.8, Mais il y a un fait que vous ne devez pas oublier, mes chers amis : c'est que, pour le Seigneur, un jour est comme mille ans et mille ans sont comme un jour. Le Seigneur n'est pas en retard dans l'accomplissement de sa promesse, comme certains se l'imaginent, il fait simplement preuve de patience à votre égard, car il ne veut pas qu'un seul périsse. Il voudrait, au contraire, que tous parviennent à se convertir. »

Donc l'auteur affirme que le royaume n'est pas en retard qu'il peut paraître en retard aux hommes, mais que Dieu a une autre mesure du temps. Il dit aussi que c'est un acte de générosité de la part de Dieu qui accorde plus de temps pour se repentir. Quand on prend l'apocalypse de Jean qui clôture le canon du Nouveau Testament, vous voyiez l'ange qui révèle à Jean : « le temps est proche » donc là encore on a un sentiment d'urgence et quand on aborde la période des pères de l'Église il y a une grande variété de textes ou des gens comme Justin martyr (100 -165) « dialogue avec Tryphon » dit explicitement que la fin des temps approche qu'il va y avoir une résurrection des corps que les saints se retrouveront à nouveau à Jérusalem. Les pères de l'Église sont orthodoxes aux yeux de la tradition comme Irénée qui réaffirmera la visée apocalyptique millénariste. Irénée écrit aux environs de l'année 200 et Tertullien aussi, tous réaffirment énergiquement que le royaume de Dieu arrive bientôt. Mais au fur et à mesure que le temps passe, la définition de bientôt doit évoluer. Un bientôt qui dure et qui durera, et dure encore jusqu'à aujourd'hui. À l'époque de la communauté primitive un horizon aussi lointain est inconcevable comme royaume. Le royaume ne se manifeste pas jour après jour les problèmes matériels reprennent leur droit pour survivre il est donc nécessaire de s'organiser et il faut accepter de s'installer dans la durée.


Rejoignez-nous sur Faceboock
https://www.facebook.com/profile.php?id=100068638013644

Optimisé par Webnode
Créez votre site web gratuitement ! Ce site internet a été réalisé avec Webnode. Créez le votre gratuitement aujourd'hui ! Commencer