Jacques le frère de Jésus

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Persuadé que le royaume de Dieu ce manifesterait de son vivant Jésus n'a pas organisé sa succession. La question se pose seulement après sa mort, et c'est Pierre parmi les disciples, qui semblent désignés pour succéder à son maître. Mais l'évangile de Matthieu est le seul à soutenir sa cause, à l'inverse, les Actes des apôtres témoin de la première communauté fait apparaître la famille de Jésus au premier plan et parmi elle Jacques le frère du Seigneur. Dans le premier chapitre des Actes, on a l'impression que l'organisation de la communauté se fait autour de personnalités comme Pierre, comme Jacques, comme Jean, les disciples de Jésus. Mais on voit qu'au bout de quelques années qu'en réalité, c'est bien la famille du ressuscité qui reçoit la succession dynastique à travers la personne de Jacques, c'est la famille de Jésus qui a pris en charge la communauté de Jérusalem.

Le livre des Actes place la famille de Jésus, Marie la mère de Jésus au milieu du cercle des douze, et l'on a là une attestation unique que ne relatent pas les évangiles. Mon interprétation c'est que Luc ou du moins l'auteur des Actes, qui est un historien de la continuité, tient à manifester, partout où cela est possible, les éléments qui relient les événements les uns avec les autres, et qui tissent une continuité, théologique. L'occasion est trop belle pour lui de mettre en évidence, la position de la famille de Jésus et notamment sa mère, avec les douze, parce que rassembler et la mère et les douze, c'est placé là, juste après la résurrection, et avant l'Ascension, les éléments caractéristiques constitutionnels d'un réseau relationnel qui était celui de Jésus durant sa vie. L'auteur des Actes a tendance à vouloir nous dire, non pas ce qui ce passe réellement, mais ce qui doit-ce passer théologiquement. C'est-à-dire qu'il veut présenter une communauté profondément unie. Il sait qu'il y a des tensions dans la communauté de Jérusalem, mais justement, il invite à aller vers une unité. Pour lui, il y aura ce que l'on appelle des sommaires des petits récits sur la communauté de Jérusalem dans lequel il dira qu'ils étaient unanimes, d'un seul cœur, il insistera beaucoup là-dessus. Quand tout à fait au début il nous dit « unanimes les disciples étaient assidus à la prière avec quelques femmes dont la mère de Jésus et avec les frères de Jésus », il nous laisse entendre qu'il n'y a plus de tension entre les disciples et la famille de Jésus.

Il est possible et même probable que la famille ait eu une activité et un regard négatif au sujet des activités de Jésus. Jésus lui-même avait pris ses distances avec sa famille. Nous sommes dans le monde méditerranéen de l'Antiquité, et les rapports familiaux étaient très forts. Ils représentaient le premier lien social. Celui qui coupait les liens avec sa famille était considéré comme un marginal un outsider, et c'est pourtant cela que Jésus a fait. Il est fort probable que la famille a réagi à cela. Dans l'évangile de Luc, Jésus déclare : « si quelqu'un vient à moi sans haïr son père sa mère son épouse, il ne peut être mon disciple ». Ce sont des mots très durs n'est-ce pas ! Dans celui de Matthieu, il dit : « aussi celui qui aime son père sa mère plus que moi n'est pas digne de moi ». Jésus a-t-il prononcé de pareilles paroles ou le fait-on dire de telles paroles ? Il est étrange que les évangiles insistent sur les aspects négatifs de la famille de Jésus excepté sa mère. Il s'agit bien sûr d'une histoire ! dans les écrits de Luc par exemple, il est question du rapport de Jésus avec les siens et de son activité à Nazareth là où sa famille habite, et où ses sœurs sont mariées. Les habitants de Nazareth le rejettent. Jésus s'enfuit alors à Capharnaüm, près du lac de Génésareth pour rejoindre ses disciples. Au chapitre 3 de l'évangile de Marc, nous lisons que les membres de sa famille ont tenté de l'arrêter, car ils s'opposaient à sa mission et à la manière de propager ses idées. La mère et les frères de Jésus attendent dehors et veulent parler avec lui. Jésus s'exclame qui sont ma mère et mes frères, et il regarde ceux qui sont assis devant lui pour l'écouter, et il dit voici ma mère et mes frères voici ma famille. C'est intéressant de voir que Marc décrit les tensions qui règnent au sein de la famille au chapitre 3 où Jésus exorcise les démons et guérit les malades, ce qu'il fait souvent dans l'évangile de Marc. On le prévient que sa famille le réclame, car ils le croient fou. Ils pensent qu'il est possédé d'un démon. C'est alors que Jésus tel que le décrit Marc, dit voici ma famille en désignant ses disciples. Ainsi l'on a tout à fait conscience que dans la jeune communauté des disciples de Jésus après Pâque du scandale qu'a représenté cette incompréhension. D'une par de la famille, et de l'autre les gens qui lui était proches, les gens de Nazareth. Alors quand l'on suit les différents évangiles, par exemple au chapitre 7 de Jean sous une autre forme, les frères de Jésus l'invitent à monter à Jérusalem pour se manifester, car ils ne peuvent, ou encore ne veulent pas comprendre que la mission de Jésus va se réaliser humblement. Les disciples aussi d'ailleurs auront la même difficulté. Et selon l'évangile de Jean, ils lui disent, mais enfin si tu veux être connu il faut te montrer et monter à Jérusalem et au verset 5 du chapitre 7 de l'évangile de Jean, l'auteur de l'évangile dit un peu perfidement que ses frères ne croyaient pas en lui. Une hypothèse qui a été défendue par un certain nombre de spécialistes, et qui semble fort intéressante, est que l'évangile de Marc, et l'évangile de Jean, loin de refléter la situation exacte des rapports familiaux de Jésus et sa famille, refléteraient les luttes de pouvoir et d'influences entre les communautés auquel ces textes ont été associés, et aurait essayé de les considérer en montrant que du vivant de Jésus les membres de la famille ne l'avaient pas soutenu, ne l'avaient pas comprit et que Jésus implicitement les avait déshérités si je puis dire, ou leur avait refusé de leur accorder un statut supérieur quelconque en disant ma famille ce sont mes disciples, ce sont ceux qui croient en moi et même si ma famille croit de toute façon ils sont comme les autres cela n'a aucune importance.

Il existe un autre texte tout à fait intéressant c'est celui où Jésus sur la croix, confit sa mère au disciple qu'il aimait. Parfois, on dit, mais si Jésus avait eu des frères et des sœurs, il n'aurait pas eu besoin de confier sa mère au disciple que Jésus aimait. On passe alors totalement à côté de ce que veut dire le texte, et l'on réduit le texte à une espèce de geste filial. Or ce texte a un tout autre sens. Jésus est en train de constituer une nouvelle communauté et dans laquelle sont rassemblés disciples et membres de sa famille redisant par là le vrai disciple, le vrai membre de sa famille c'est celui qui se comporte comme ce disciple qu'il aimait.

La communauté qui se constitue après la mort de Jésus regroupe donc ses compagnons, ses partisans, les membres de sa famille et ses propres frères. Pour beaucoup, cela peut paraître surprenant et d'autant plus surprenant que la tradition catholique n'ait jamais accordé à Marie d'avoir eu d'autres enfants que Jésus. Or je ne trouve pas surprenant que Jésus eût des frères et des sœurs, à l'inverse de ce que l'Église durant toute l'Antiquité et durant tout le Moyen Âge a essayé d'imposer à ses fidèles. C'était très différent à la mort de Jésus, et durant le premier siècle. Il faut prendre en compte ce que l'Église a vraiment essayé d'inculquer à la fin de l'Antiquité, et pendant tout le Moyen Âge, à savoir non seulement que Marie était vierge lorsqu'elle a enfanté Jésus, mais qu'elle est en plus restée « immaculé » et vierge durant toute sa vie, c'est-à-dire que même son mari n'avait jamais couché avec elle. Qu'elle n'a jamais connu d'homme durant toute son existence ! À la suite de cette doctrine, il a fallu bien entendu supprimer ou expliquer différemment le fait que dans les premiers textes chrétiens, il est affirmé que Jésus a bien eu des frères et des sœurs. Dans l'évangile selon Marc au chapitre 6, par exemple, l'évangéliste nous indique le nom des frères de Jésus, et il sous-entend qu'il avait au moins deux sœurs. Marc, ch 6, V 1 à 3 : « Sorti de là, Jésus se rendit dans son lieu d'origine, et ses disciples le suivirent.Le jour du sabbat, il se mit à enseigner dans la synagogue. De nombreux auditeurs, frappés d'étonnement, disaient : "D'où cela lui vient-il ? Quels est cette sagesse qui lui a été donnée, et ces grands miracles qui se réalisent par ses mains ?N'est-il pas le charpentier, le fils de Marie, et le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas ici chez nous ?" Et ils étaient profondément choqués à son sujet. »

Un détail intéressant apparaît subtilement derrière le nom des frères de Jésus. Traduit en hébreu ce sont les noms des grands fondateurs de la nation d'Israël. Jacques est en fait Jacov ou Jacob, qui est bien sûr le plus grand de la lignée des patriarches, avec Isaac et Jacob comme fondateur des 12 tributs. On a aussi Joseph, Juda, et enfin Simon. Joseph est l'un des grands personnages avec le quels fini le livre de la genèse, et Juda et Simon sont aussi deux patriarches des tribus d'Israël. On nous présente donc une famille très patriote. Le texte est vraiment limpide, il parle de la famille de Jésus, de sa mère, de ses frères, de ses sœurs, sans aucune réticence, sans aucune difficulté ni ambiguïté. Alors en effet l'on sait bien que ce texte au sein de l'Église catholique et romaine a posé de nombreux problèmes par la suite. Car à cause d'une affirmation christologique, sur la nature du Christ, autrement dit le fait d'affirmer que Jésus est le fils unique du Père, ce qui est une affirmation théologique, a été considéré comme une affirmation biologique. Du coup, dans la tradition de lecture, ce texte a été considéré comme indécent. Indécent, car comment peut-on parler des frères et des sœurs de Jésus si par ailleurs Jésus est confessé comme le fils unique du Père, et qui plus est Marie sa mère est dite vierge perpétuelle ? On voit bien que la confession de Jésus fils unique du Père et sa mère la vierge perpétuelle l'a emporté sur la narration de l'identité familiale de Jésus.

Pourtant et il est vrai que dans son évangile Marc ne raconte jamais que Jésus serait né d'une vierge, apparemment celui-ci l'ignorait. Mais même les évangiles de Luc et Matthieu qui reprennent la tradition de la naissance virginale parlent des frères et sœurs de Jésus ! Alors ? Ils n'éprouvent pas le besoin de préciser que les mots doivent être pris au sens figuré. Il n'y a aucune raison de ne pas comprendre ces textes à la lettre. Il est dit dans l'évangile de Luc « elle mit au monde son premier né » ce qui sous-entend bien sûr que Marie a mis au monde d'autres enfants ; sinon à quoi cela sert-il de préciser qu'il s'agissait du premier né ? En dehors des évangiles Paul parle lui aussi des frères et sœurs de Jésus. Cela fait beaucoup quand même ! Il faut, je crois, s'en tenir à la lettre sans interprétation particulière des textes, et sans manières artificielles.

Le problème des frères et des sœurs de Jésus a émergé dans la conscience chrétienne lorsque Marie fut déclarée par l'Église éternellement vierge, lorsque s'élabore la doctrine de la conception miraculeuse du fils de Dieu. Pendant des siècles, les théologiens vont s'employer à expliquer l'inexplicable. La doctrine de la virginité perpétuelle de Marie, nous éclair en réalité sur la perception théologique de la sexualité au IV et V siècle au moment ou la doctrine se forme. Dans la pensée catholique, cette doctrine se fonde sur des textes datant de la fin du premier siècle qui mentionnent la virginité de Marie à la naissance de Jésus. C'est une sorte de potage fait de divers légumes récoltés dans la traduction grecque de la Bible. Comment Jésus de Nazareth peut-il être de Bethléem ? C'est comme cela il est de Bethléem, car c'est la ville du Messie de même les récits de la naissance de Jésus sont tout à fait contradictoires et la virginité de Marie, vient d'une citation détourner de la Bible pour placer Jésus dans un contexte davidique.

Donc je crois comprendre pourquoi la doctrine de la virginité perpétuelle de Marie a été développée par Ambroise (330-397) à la suite d'Augustin (354-430) de notre ère, c'est-à-dire quand la doctrine du péché originel devient une « maladie » sexuellement transmissible ou plutôt une tare génétique et héréditaire chez l'être humain, sauf pour Marie et Jésus qui sont sans tache. En fait Marie et à sa suite, son fils Jésus aurait profité d'une mutation génétique qui s'est perdue puisque Marie est restée vierge. Tout cela est superbement organisé dans un système rationnel, au quatrième siècle. Mais cela ne nous apprend rien sur ce qu'était Marie historiquement ni sur la relation biologique et génétique entre Jacques et Jésus. Il est aussi intéressant de noter que Jésus notamment dans l'évangile de Marc est appelé fils de Marie ce qui peut être interprété de façon assez spéciale et c'est pas toujours un compliment. Ce qui peut vouloir dire que le père de Jésus était inconnu puisqu'en général à l'époque et surtout dans le milieu juif, les gens étaient désignés comme fils de leur père ce qui peut suggérer et donc c'est une autre hypothèse sur les relations de parenté entre Jésus et Jacques que Jésus fût un enfant illégitime donc de Marie qui aurait eu des relations avec quelqu'un d'autre ou qui aurait été violée, et l'enfant aurait été accepté dans le foyer de Joseph. C'est en tout cas une conception que l'on retrouve dans la littérature polémique juive postérieure, où Jésus aurait été le fils illégitime de Marie avec un légionnaire romain nommé Ben Panthera, donc là nous sommes peut-être dans le domaine de la diffamation, mais il s'agit d'une hypothèse qui a été considérée sérieusement par quelques spécialistes et qui n'est certainement pas impossible. Si l'on prend les documents non chrétiens ou extra chrétiens, il en existe à ce sujet, je pense notamment à certaines pages du philosophe païen Celse qui racontait que Jésus était le fils d'un soldat romain. Enfin à ce point-là on peut dire n'importe quoi n'est-ce pas en plus Celse avait des sources juives alors les chrétiens s'insurgent et disent c'est une calomnie et alors vous comprendrez que l'historien n'est plus à même de gérer correctement de tels documents. Enfin, à ce niveau tout devient possible. Les calomnies, les insultes, la manipulation des documents, tout devient difficile à comprendre. Une chose est claire, c'est qu'il y avait une très forte préoccupation théologique à propos de la naissance virginale, il faudrait s'interroger sur cette intention théologique avant de se demander si tout cela est vrai du point de vue historique. Que Marie soit vierge avant la naissance de Jésus çà c'est une histoire, cela en est une autre de pensée comme et selon le dogme de l'Immaculée Conception, qu'elle est restée vierge. C'est un développement tardif et délicat à soutenir. Comment Marie aurait-elle pu donner des frères et des sœurs à Jésus sans jamais coucher avec personne ? Pourtant historiquement, c'est ce que la théologie a voulu affirmer, la sexualité a toujours eu la mauvaise part dans l'Église et l'on ne souhaite pas que Marie ait à faire avec le sexe et la chair.

En tant que protestant je refuse de pénétrer les fondements de la foi catholique nous avons construit des fables incroyables sur notre propre histoire, par exemple Luther qui aurait été touché par la foudre et qui aurait survécu. Tout ce genre de légendes ne peut pas être vérifié. C'est seulement par la suite quand on a commencé à insister sur la virginité de Marie pendant la naissance et encore plus après la naissance en sorte que s'est posé le problème des frères et des sœurs de Jésus.

La question a été résolue de plusieurs manières.

Vers la fin du deuxième siècle, il y a un texte qui raconte la naissance de Marie la naissance de Jésus connu sous le nom de proévangile de Jacques. C'est le nom moderne de ce texte qui probablement s'appelait à l'origine la nativité de Marie. Dans ce texte de la fin du deuxième siècle, on dit que lorsque Joseph accueille Marie il était déjà âgé, et qu'il avait des enfants d'un premier mariage. Il s'agit en outre d'un moyen pour résoudre le problème des frères et sœurs de Jésus et qui deviennent de la sorte des demi-frères et demi-sœurs, c'est-à-dire des fils de Joseph et non de Marie. Il y aura une autre ligne qui sera développée à partir, disons de la fin du quatrième siècle, et c'est celle de Jérôme. Celui-ci va dire qu'il a étudié de près tous les textes qui concernent les questions de généalogie de Jésus - puis à la fin de sa vie d'ailleurs il dirait qu'en fait toutes ses études ne l'ont pas tellement conduit à un jugement définitif, - mais qu'il est clair que les frères et sœurs sont les fils d'une autre Marie que Marie la mère de Jésus. Circuler il n'y a plus rien à en dire. En fait la démonstration de Jérôme à partir des textes est assez peut crédible, en tout cas à mon avis elle ne peut convaincre que les convaincus, mais les convaincus furent effectivement convaincus et de plus en plus convaincus, et Jacques est resté le cousin de Jésus au moins pour les catholiques. Donc pour les catholiques Jacques et ses frères et ses sœurs, sont toujours les cousins et cousines de Jésus. La raison en est simple, c'est qu'il y a toute une tradition qui dit volontiers les textes sont en grec, mais ils sont profondément marqués par une culture sémitique, et dans ce cas là, que dit-on !

On dit les frères et sœurs en hébreu אח אחות ach et Achowth évoque non pas que des frères et sœurs mêmes père même mère, mais aussi des parents des cousins. C'est certain que dans les langues sémitiques, on peut utiliser un même terme avec des connotations différentes, mais ici les évangiles sont écrits en grec, pas en hébreu et il y a deux termes distincts pour frère et cousin en grec. On ne comprend pas pourquoi on n'aurait pas fait de distinction et l'historien n'a pas de raison suffisante pour interpréter le terme frère dans un sens différent de celui qu'il a habituellement en grec. De plus cette lecture des textes, est confirmés par les épîtres de Paul dont le grec je le rappelle était la langue maternelle, et celui-ci parle de Jacques comme le frère de Jésus. Mais la mauvaise foi est tenace, alors on dit, mais dans l'Église primitive on est tous des frères ! mais apparemment c'est le seul que Paul appel Jacques le frère de Jésus « adelphos » en grec, qui signifie bien frère, il ne signifie pas cousin, car il y a un mot grec qui est « anepsios » et qui signifie lui cousin. Donc il me semble que si Paul - qui n'est pas un imbécile qu'en même - qui écrit pour des Grecs voulait désigner des cousins, il aurait eu recourt à « anepsios » et non pas « adelphos ». Pour moi à mon sens, au niveau de l'historien on doit plutôt penser tout en respectent bien l'autre position, que les frères son des frères issues de même père, et même mère, et non pas le sens de parenté large. On voit bien que la question telle qu'elle se pose c'est au fond l'étonnement qui était aussi celui du lecteur de l'Évangile, entre d'un côté une identité juive et d'autre part une affirmation de foi selon laquelle cet être-là était unique et l'on essaie déjà de tenir ensemble ces deux affirmations ce qui va aboutir aux spéculations sur la doctrine de la virginité perpétuelle.

Voilà comment la théologie et même plus je dirais l'idéologie du christianisme ou du moins les pères de l'Église des premiers siècles traitaient l'histoire, du moins l'historique de la vie de Jésus.

Pour moi, maintenir le fait que Jésus biologiquement appartient à une famille dans lequel s'inscrivent également des frères et des sœurs, c'est confirmer concrètement son appartenance à la judéité, à son humanité concrète son insertion dans cette humanité.

Non seulement Jésus à eu des frères, mais l'un d'eux Jacques fut vite une figure éminente de la première communauté. Donc Jacques était le plus célèbre des frères de Jésus, probablement le plus doué d'entre eux, en dehors de Jésus lui-même.

N'oublions pas que Jacques est la clef de voûte de nombreux mystères dans cette histoire. C'est un personnage mystérieux et inquiétant dans la suite des frères de Jésus. C'est un élément fondamental pour comprendre tous les conflits intérieurs à la communauté chrétienne et les conflits entre la communauté chrétienne et le monde judaïque dans lequel il baigne. Jacques est un personnage clef, mais hélas ! il reste assez problématique. Nous n'avons pas encore réussi à comprendre de quel côté se situe Jacques avec qui il est, car Paul nous en donne une certaine image, et les Actes des apôtres une autre, et donc Jacques a deux faces, car il n'y a pas d'autres sources. Pour l'historien comme pour la tradition chrétienne, ce serait bien plus intéressant d'avoir qu'un seul récit clair et précis sans lacune nous racontant comment Jacques va tout d'un coup devenir figure majeure. Seul un unique verset dans la première épître aux Corinthiens témoigne que le Christ ressuscité est apparu à Jacques. Cette histoire clef n'apparaît nulle part ailleurs, seul Paul semble la connaître, et cela ne lui pose pas de problème.

Les papyrus les plus anciens du Nouveau Testament sont conservés à Londres ou encore à Dublin, et dans un fragment d'une copie de la première épître aux Corinthiens, écrite par Paul, on retrouve la liste de ceux auxquels le ressuscité serait apparu et parmi eux Jacques.

Il y a là un changement qui est important lié certainement au fait que Jacques et il n'y a pas de raison d'en douter était bénéficiaire selon la tradition d'une des apparitions du ressuscité puisqu'il figure dans ce qui est la liste d'apparition du ressuscité et qui est sans doute traditionnel que livre Paul dans le chapitre 15 de la première épître aux Corinthiens. Jacques représente en quelque sorte la seconde vague d'apparition du ressuscité après une première vague qui était comme commandée et coordonnée par Pierre ou autour de la figure de Pierre, il y en a une deuxième qui tournait autour de la figure de Jacques. Ce texte est intéressant parce qu'en tout cas visiblement il est construit comme un TGV c'est-à-dire que nous avons en tout cas deux rames l'une après l'autre, et deux rames qui semblent construites de manière parallèle. voici le texte :

05 il est apparu à Pierre, puis aux douze ; (premier wagon) 06 ensuite, il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois - la plupart sont encore vivants, et quelques-uns sont endormis dans la mort -, ensuite on a l'impression de recommencer avec une nouvelle locomotive avec la figure de Jacques. 07 ensuite, il est apparu à Jacques, puis à tous les apôtres.08 Et en tout dernier lieu, il est même apparu à l'avorton que je suis.

Or dans tout le reste du Nouveau Testament, nous n'avons à aucun autre endroit une allusion à une apparition de Jésus ressuscité à Jacques. Cela est intéressant, car cela montre que les documents du Nouveau Testament ne donnent pas beaucoup d'importance ni même de pouvoir à la figure de Jacques. La difficulté que nous avons aussi bien avec Pierre qu'avec Jacques c'est que ce sont des gens qui en tout cas de manière directe n'ont laissé aucune trace. C'est-à-dire que les gens qui parlent de Pierre les gens qui parlent de Jacques, sont des gens qui soit ont été en conflit avec l'un ou l'autre, soit qu'ils présentent l'un ou l'autre comme des figures importantes, mais ce sont toujours des présentations extérieures.

Quand on examine les textes du Nouveau Testament, nous devons employer une méthode proche de la stratigraphie. Il n'y avait pas de reporters, de journalistes ou de chroniqueurs n'est-ce pas au milieu du premier siècle, si nous regardons en arrière c'est comme scruter à travers l'eau et plus c'est profond plus c'est obscur. En fait, Jacques disparaît dans la tradition évangélique la plus récente. Alors qu'il était très présent chez Paul quelques décennies avant la rédaction des évangiles et juste après la mort de Jésus. Puis il réapparaît dans le livre des Actes comme un personnage de première importance. En d'autres termes, la tradition est fluctuante. On peut avoir deux approches une première c'est de regarder chronologiquement à qu'elle époque dans la communauté chrétienne comment la figure de Jacques était-elle vue. Dans ce cas, on a d'abord par ordre de production : épître aux Galates (50 - 60), dans laquelle la figure de Jacques reçoit une certaine importance ; mais où l'on sent aussi un tiraillement très fort au moins de gens qui se réclament de Jacques avec Paul. Ensuite on à une seconde étape c'est dans l'évangile de Marc vers les années 65 - 70 où là on peut dire que l'on ne voit pas Jacques où il a un rôle tout à fait mineur une simple mention frères de Jésus. Après on a un troisième temps c'est avec les Actes des Apôtres, à ce moment-là Jacques apparaît comme véritablement le personnage clef, chef de la communauté de Jérusalem ou au moins chef d'une communauté à Jérusalem et de la communauté dominante à Jérusalem. Là, je serais assez conservateur dans la mesure où Paul est un témoin de la première heure, et si Paul dit que Jacques est un personnage important à Jérusalem, je pense en effet que c'était le cas et c'est attesté par les lettres de Paul lui-même et confirmé par les Actes des Apôtres. Je dirais même que je crois que Jacques a été une personnalité dominante uniquement en se basant sur l'épître aux Galates. La disparition de Pierre, sa mort ou son exil correspond selon les Actes des apôtres à la prise de pouvoir par Jacques le frère de Jésus. D'après plusieurs textes il semble que durant la décennie et même la plus grande part de la deuxième décennie suivant la mort de Jésus, Pierre était le principal chef du groupe ceci apparaît clairement plusieurs fois même si dans certains cas, quand les chefs se réunissent, ce n'est pas Pierre qui parle en premier, mais Jacques. Il y a toujours cette ambivalence. Néanmoins, il est très intéressant de voir comment au moins selon Luc dans les Actes et selon les évangiles apocryphes Pierre disparaît ensuite complètement du tableau. Soit, il est parti à l'étranger, soit il a quitté la Judée, soit quelqu'un d'autre a pris sa place. Pierre peu à peu s'élimine on nous dit qu'il se déplace continuellement, et à partir du chapitre 12 on nous dit d'une certaine manière sa fin, car il sort d'une manière très curieuse de notre champ d'observation puisqu'il est en prison et qu'il est libéré par un ange. On est en train de nous dire que Pierre pare vers d'autres lieux que c'est sa mort pour la communauté de Jérusalem qu'il part vers d'autres lieux et que le Seigneur le protégera dans ses nouvelles fonctions. Alors si nous revenons à Jacques le frère de Jésus, ce dernier a le champ libre à Jérusalem. Et que cela soit la version de Galate qui accentue le fait, mais surtout dans le récit des Actes des apôtres au moment de l'assemblée de Jérusalem, l'homme fort comme on dit aujourd'hui c'est Jacques. Il y a là deux mystères, qui sont attachés à la personne de Jacques. Le premier est la raison pour laquelle Jacques a succédé à Pierre comme figure éminente de la communauté de Jérusalem. Il s'agit d'une communauté dans laquelle les premiers chrétiens ont très tôt reconnu et qui sait arrogé un droit de regard sur les communautés érigées par Paul, et ce droit de regard était reconnue et contesté à la fois par Paul, mais n'empêche que Paul va monter à Jérusalem pour cette fameuse assemblée de 46 -49. Cela signifie bien que la communauté de Jérusalem avec Jacques à sa tête a bénéficié d'une autorité à nulle autre pareille dans les premières décennies après la mort de Jésus. Donc premier mystère pourquoi Jacques a-t-il succédé à Pierre. Deuxième mystère, pourquoi une autorité aussi forte a tel été accordé à quelqu'un qui ne faisait pas partie des douze apôtres c'est-à-dire des fidèles de Jésus ?

Autrement dit, qui peut se substituer à la présence physique de Jésus.

Il y a eu certainement des réponses différentes. Dans la famille, la réponse a dû être que la succession était garantie par la famille, et l'on va poursuivre l'œuvre que Jésus a commencée, en attendant la réalisation du royaume de Dieu. Si l'on essaie d'imaginer le tableau du christianisme en l'an 30 après Jésus, en fait qui est Jésus pour tous ces gens ? On voit très bien qui il est pour les Galiléens. À Jérusalem qui il est pour les pèlerins, probablement qu'il a parlé visiblement il a fait quelque chose qui ne plaisait pas au temple, mis à mort visiblement il est apparut vivant, et alors à la suite des apparitions et au moment où ces réseaux qui forment le christianisme primitif se mettent en place on voit tout d'un coup apparaître Jacques comme figure nouvelle. Et l'on voit apparaître la famille de Jésus.

C'est une structure que l'on connaît extrêmement bien. De nouveau si vous prenez les figures philosophiques, les maîtres de la psychanalyste, c'est toujours cette question qui se pose : où est l'héritage et où doit aller l'héritage ? Aux disciples du maître ou à sa famille ? On voit apparaître la famille qui se convertit juste après la Pâque et les compagnons de la première heure les disciples qui suivaient Jésus. On retrouve de nombreux parallèles dans l'histoire des religions, après la mort de Mahomet, l'islam s'est propagé grâce aux membres de la famille et grâce à ses disciples. L'histoire a été semblable chez les mormons après leurs scissions. La famille, la femme et les frères du fondateur ont développé leur doctrine tandis qu'une autre doctrine était développée par ses disciples. C'est tout à fait typique, à un mouvement spirituel celui-ci se propage soit par l'intermédiaire de la famille du fondateur soit par l'intermédiaire de ses disciples. C'est ce que l'on observe ici dans le christianisme primitif. Ce qui est intéressant dans cette prise de pouvoir de Jacques, c'est que l'on n'est pas dans la même logique de succession. Avec Pierre, on a une succession type affinitaire c'est-à-dire que c'est le disciple qui succède au maître. En revanche avec Jacques, ce n'est plus une succession de type affinitaire, mais c'est une succession du type dynastique en quelle sorte puisque c'est un membre de la famille qui succède au maître ?

Alors, peut-être le terme dynastique est-il un peu fort, disons qu'il y a une succession généalogique, une succession de sang. On fait appel à la famille pour régler les problèmes de la famille. C'est quelque chose que l'on a connu je l'ai dit dans l'islam au moment de la succession de Mahomet c'est-à-dire que ce sont les proches du Prophète qui peuvent parler du Prophète au nom du Prophète et assurer la continuité du Prophète. Or Jacques tel qu'il apparaît, est un juif très pieux selon la tradition, et qui est reporté aussi par Flavius Joseph. C'est un juif qui est respecté des autres juifs, qui pratique intégralement les obligations de la religion juive, qui va au temple, et c'est comme le font d'ailleurs les premiers adeptes de la foi chrétienne à Jérusalem. Donc pour ces gens, c'est quelqu'un qui peut incarner une continuité à la fois familiale et inscrivant la foi au Nazaréen dans le judaïsme. Si nous acceptons que l'épître attribuée à Jacques reflète réellement ses opinions, alors nous devons admettre que Jésus pensait la même chose. C'est un point de vue très conservateur. L'opinion traditionnelle d'un juif pieux. Donc il semble y avoir dans l'épître quelque chose de très proche de Jacques. En tant que juif orthodoxe, et en ce sens il y a quelque chose de très fidèle à Jésus. Selon l'historien juif Flavius Joseph, Jacques meurt lapidé en 62 à l'instigation du grand prêtre Anne qui voit en lui un rival potentiel. Il sera connu ensuite comme Jacques le Juste, c'est-à-dire fidèle à la loi, un observant strictes un ascète. La tradition chrétienne place à la fin du Nouveau Testament une épître sous le nom de Jacques, tout en s'employant paradoxalement a effacé son souvenir. Donc la figure de Jacques apparaît comme une figure qui au départ est centrale, et qui au fur et à mesure que le christianisme se développe elle va devenir une figure marginale, puis une figure presque oubliée, qu'on peut réutiliser symboliquement pour quelque chose de tout à fait différent.

La personne de Jacques a souffert de trois handicaps importants, d'abord Jacques était le frère de Jésus, à une période où Jésus n'était plus supposé avoir eu des frères et des sœurs, donc c'est devenu comme un personnage un petit peu embarrassant. Jacques était un juif très strict très pieux, pratiquant et fidèle à la loi mosaïque, et pas vraiment positive vis-à-vis des pagano-chrétiens à une époque où alors que le sens de l'histoire allait dans le sans de l'abandon de la loi mosaïque et de la prééminence des gentils (des non-juifs) et donc Jacques au point d'une idée pratique est de plus en plus apparu comme un fossile un peut dépassé. En dernier lieu, Jacques était le chef de l'Église de Jérusalem, initialement l'Église dominante dans le monde chrétien, alors que l'évolution ultérieure a fait de Rome l'Église principale. L'Église de Rome a pour saint patron si je puis dire, Pierre et Paul. Donc Jacques est petit à petit devenu un personnage anachronique un peut fossilisé, embarrassant, il a perdu son identité en plus d'être le frère de Jésus on en a fait un cousin ; on l'a identifié à Jacques d'Alphée qui était un apôtre sans personnalité particulière, donc il a été la victime d'une déformation identitaire progressive de la part de l'Église.

Juste après la mort de Jésus du vivant de Jacques, de Pierre des douze disciples, la communauté primitive est animée par l'espérance de l'arrivée imminente du royaume dans ce nouvel ordre du monde, les uns et les autres se disputent pour savoir qui occupera les meilleures places dans ce nouveau royaume. Le royaume annoncé ne saurait être que le royaume d'Israël, Israël purifié de l'occupation romaine un royaume bien terrestre. C'est là que l'on voit que cette première communauté n'avait pas vraiment bien compris voir même grand-chose de l'enseignement de Jésus. 

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